Alors que le soleil brille intensément pour un après-midi de décembre, un prêtre, entouré d’une petite foule de sympathisants, avance d’un pas résolu vers les escaliers menant à l’auberge et au bureau du commandeur du bastion. Intrigué, vous vous rapprochez de cette figure singulière, la foule scandant son nom avec ferveur : « Savonarola ! ». Ce nom, célèbre pour ses prédications enflammées contre les Médicis, le Pape Alexandre VI, et contre la corruption morale du clergé, résonne puissamment. Vous entendez dire que, si autrefois Girolamo Savonarola s’exprimait avec passion, c’est désormais avec une véhémence redoublée qu’il partage ses idées.
Savonarola gravit quelques marches, remarquant d’autres visages que ceux de ses fidèles… vous ! Il s’arrête soudain, se tournant vers la petite foule. Un silence pesant s’installe, puis, d’une voix calme mais empreinte de gravité, il commence son discours, captivant chaque âme présente.
« C’est avec une profonde indignation que je me tiens devant vous aujourd’hui. Vous avez été mystifiés, pervertis. Cette Kumpania, les Médicis, et même notre église cherchent à faire de vous des agneaux, destinés à l’abattoir. Tous sont aux abois, soumis à une malédiction divine pour avoir tenté de reproduire le péché originel. Une malédiction mortelle guette ceux qui osent défier les commandements de Dieu. Et tous… tous ont cru pouvoir le faire sans honte.
Maintenant, ils sont moribonds, et vous… vous êtes les prochains sur la liste, mes enfants. On vous parle de présents mystérieux, de cadeaux uniques, mais c’est la mort qui vous attend, rien de moins ! La question demeure : qui paiera la note finale ? Les puissants qui vous avilissent, les riches qui ont financé cette mascarade de Kumpania, ou bien les pauvres âmes comme vous ?
Je ne vous demande pas de me croire sur parole, mais de considérer mon avertissement, de réfléchir par vous-mêmes, pour votre propre salut. Je vais maintenant confronter directement votre hôte, qui participe à cette infamie, j’ose espérer, sans en comprendre pleinement la trame machiavélique.
Que Dieu vous garde tous, même les infidèles, car je ne souhaite à personne d’endurer cette malédiction. Que Dieu vous protège. »
Savonarola se remet en marche, résolu à s’entretenir avec Maître Di Falcone. Andreas, seul représentant de la Kumpania présent, semble perturbé. Pourtant, il s’incline respectueusement devant le père Savonarola, le remerciant pour ses sages paroles. Andreas le suit des yeux jusqu’à ce qu’il disparaisse dans l’auberge, accompagné de ses fidèles. Puis, il s’assied sur les marches, laissant un lourd silence planer avant de prendre la parole.
« Je respecte profondément le père Savonarola et je suis certain qu’il est sincère dans sa foi. Cependant, il me revient de clarifier son point de vue, quelque peu biaisé. Ce n’était pas de cette façon que nous voulions vous révéler cette nouvelle, mais je ne peux pas vous laisser dans une telle confusion. Le cadeau que Lauryn Ollam et le chevalier Baillard, représentants des deux plus grands cultes d’Europe, nous ont apporté n’est autre qu’une graine. Une graine de l’arbre de la connaissance.
Cette graine a été offerte à la Marche. Avec l’aide des Médicis, nous avons fondé cette Kumpania pour en faire le berceau de cet arbre à naître. Le père Savonarola vous a parlé d’une malédiction et il n’a pas menti. Cette graine est en effet accompagnée d’une malédiction que nous essayons de contrer, malheureusement sans succès pour l’instant.
Oui, la Kumpania aura besoin d’aide. Oui, les plus forts et les plus sages d’entre nous sont déjà affaiblis : Anne, Katerine, Ubaldo, Mélodie, Saskia, Cosme, et même Maître Di Falcone. Ils ont choisi de risquer leur vie, leur santé mentale, et de mettre leur foi à l’épreuve pour cet espoir. Personne ici ne vous manipulera ni ne vous forcera à participer. Mais pour ceux qui souhaitent aider, il est vrai que le risque est bien réel… et potentiellement mortel.
Voilà où nous en sommes : une graine d’un arbre biblique est à notre portée, une source de connaissance mais aussi de convoitise et de danger. Je ne peux pas être plus franc avec vous, mes frères et sœurs. »
Andreas reste immobile, scrutant vos réactions. Mais la nouvelle est encore trop fraîche, et vous n’avez pas encore assimilé l’ampleur de ces révélations. Finalement, Andreas lance sa pièce fétiche, observe son résultat, puis se lève sans un mot.